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L’accès au codex pour tous.

A travers notre blog, nous avons utilisé à de nombreuses reprises les croquis des carnets de notes de Léonard de Vinci pour illustrer nos articles. Ces carnets de notes, ce sont généralement les codex, véritables ressources d’informations au sujet du génie de Léonard, ses inventions, ses observations… Nous en avons notamment déjà parlé dans plusieurs articles comme celui sur le reportage ARTE qui traite de la polyvalence de Léonard de Vinci et comment cela est reflété dans le codex Atlanticus.

Les premiers manuscrits connus datent de 1482, correspondant à son arrivée à Milan, mais Léonard continua d’en rédiger jusqu’à la fin de sa vie, avant de les confier à son disciple Francesco Melzi. Il est estimé qu’il aurait existé plus de quinze mille pages. Il n’en resterait donc aujourd’hui à peine la moitié, conservée dans 25 codex. Ces codex sont plus ou moins hétéroclites, certains étant plutôt spécialisés et classés tandis que d’autres présentent des notes très variées et touchant à de nombreux domaines. On aurait donc parfois simplement affaire à de simples carnets de notes prises au hasard selon le fil de pensée de Léonard. On peut donc parfois y trouver comptabilité, cartographie, inventaires…

Le mini-site « Léonard Interactif » de la BNE (Bibliothèque Nationale d’Espagne), sur lequel nous avons déjà fait un article, propose une liste et un descriptif (en espagnol) de neuf codex, ainsi que leur lieu de conservation respectif. Autre outil important : il propose mappemonde tronquée des lieux de conservations et interactive, permettant de cliquer directement sur les lieux et d’accéder aux descriptions.

Map des codex de la BNE, Capture d'écran, Codex, Léonard Interactif, Bibliothèque Nationale d'Espagne (BNE).
Map des codex de la BNE, Capture d’écran © Codex, Léonard Interactif, Bibliothèque Nationale d’Espagne (BNE).

Nous pouvons donc retrouver :

  • Le Codex Windsor, conservé à la Librairie Royale du Château Windsor. Comme le codex Atlanticus ou encore le Codex de Madrid, ce codex fut acheté par Pompeo Leoni avant d’aller en Espagne. C’est le comte Thomas Howard qui l’acquit par la suite avant d’être probablement récupéré par Charles II, roi d’Angleterre. C’est son plus grand recueil en anatomie de Léonard, qu’il constitua à partir de la dissection et de l’observation des mouvements. Il contient environ 600 dessins. Ils sont exposés

    Plume et encre au lavis par dessus craie noire, 1510-1511, 29.2x19.8cm, Codex Windsor, Royal Collection Trust, Château Windsor, Londres, Royaume-Uni.
    Plume et encre au lavis par dessus craie noire, 1510-1511, 29.2×19.8cm © Codex Windsor, Royal Collection Trust, Château Windsor, Londres, Royaume-Uni.

    dans la Galerie de la Reine. Sur le site de la Royal Collection, cette institution possédant des dizaines de milliers de pièces de collection, il est normal de ne pas trouver une catégorie ou un lien direct vers le codex. Il faut donc se rendre dans les collections et taper le nom de « Vinci » pour restreindre la recherche à ce codex. On retrouve alors 168 pages numérisées dans une qualité exceptionnelle. Chaque image possède son propre descriptif pour expliquer les croquis le composant. Il ne semble pas possible de classer les pages dans leur ordre originel, il faut donc les parcourir une par une ou taper des mots-clés dans l’outil de recherche si on cherche un sujet particulier. L’outil de diapositive intégrée est plutôt agréable si l’on souhaite prendre le temps de regarder la collection. En général, ce site est agréable, sobre et simple d’utilisation, même s’il ne possède pas de page particulière pour le codex.

  • Le Codex d’Arundel, conservé au British Museum de Londres. Composé de 268 pages, il est divisé en deux parties de feuilles de format différent : une première partie de 30 feuilles et le reste dans une seconde partie. Les sujets traités y sont encore variés : anatomie, optique, physique, architecture… Si on ne trouve pas ce codex dans les collections affichées sur le site du British Museum, il peut être trouvé sur le site de la British Library. Ce site nous propose une diapositive simple de 570 pages numérisées. On peut simplement se contenter de circuler de feuille en feuille ou bien de sélectionner le numéro/ « nom » de la feuille. Faire une recherche de contenu n’est donc pas possible et parcourir les 570 pages peut être fastidieux pour des recherches. Cependant, il est déjà notable d’avoir réalisé ce travail de numérisation.

  • Le Codex Forster, conservé au Victoria & Albert Museum de Londres. Il s’agit en réalité de trois petits codex. Le premier est consacré à la géométrie dans l’espace et à l’hydraulique. Le second concerne une de ses peintures et des expériences autour de théories. Le dernier constitue une grande partie des travaux et notes qu’il a pris lorsqu’il était la cour de Ludovico Sforza comme sa fameuse statue équestre, des projets urbanistiques de la ville de Milan etc. Si une section entière du V&A Museum est dédiée au Codex Forster, proposant des pages d’explications sur Léonard, son contexte, ses lectures, son manuscrit etc., la page « Explore the Forster Codices » (explorer les codex Forster) ne fonctionne pas, sous Mac comme PC et sous différents navigateurs (Safari, IE, Mozilla Firefox, Chrome testés) . C’est vraiment regrettable car selon les indications, il s’agissait une nouvelle fois d’un travail de numérisation des pages de codex pour permettre une lecture interactive en ligne, en plus d’avoir une transcription en italien et en anglais. En espérant qu’il ne s’agisse que d’un problème technique momentané.

  • Le Codex du Vol des Oiseaux, conservé à la Bibliothèque Royale de Turin. A l’origine, il s’agit d’un petit manuscrit lié au Manuscrit de France (voir plus bas). Comme indiqué explicitement dans son nom, ce codex comporte essentiellement des études autour du vol des oiseaux mais donc aussi autour de ses fameuses machines volantes. L’Institut de France possède un fac-simile photographique du codex. Nous n’avons malheureusement pu trouver de numérisation ou de section consacrée à leur sujet, ni sur le site de la Bibliothèque Royale de Turin, ni sur le site de la Bibliothèque de l’Institut de France.

  • Le Codex Trivulzianus, conservé à la Bibliothèque du Château Sforzesco. Ce manuscrit contient essentiellement des études grammaticales autour du latin, des jeux de mémoires, des caricatures mais aussi quelques architectures militaires et religieuses. Malheureusement, ce codex est fermé au public et le site de la Bibliothèque ne propose donc pas de lecture en ligne ni même d’aperçu.

  • Le Codex Leicester ou Hammer, conservé dans la collection Bill Gates à Seattle (Washington). Il est consacré essentiellement à l’étude de l’eau sur un plan géologique, géographique mais aussi une étude sur les montagnes, les fossiles ou encore l’astronomie. Cependant, encore une fois, nous ne pouvons y accéder car il s’agit d’une collection privée.

    Encre sur velin, 1506-1508, Codex Leicester, Fondation Bill Gates, Seattle, Washington.
    Encre sur velin, 1506-1508 © Codex Leicester, Fondation Bill Gates, Seattle, Washington.
  • Le Codex de Madrid, conservé à la Bibliothèque Nationale d’Espagne. Nous avons déjà consacré un long article à son sujet, nous vous invitons donc à venir le découvrir.

  • Le Manuscrit de France, conservé à l’Institut de France. Bien qu’il porte le nom de manuscrit, il s’agit bien d’une sorte de codex, que Napoléon Bonaparte avait acquis. Il est composé de quatorze manuscrits, de la lettre A à M, eux-mêmes composés de plusieurs dizaines de pages parfois, faisant donc de lui un écrit important. Une page lui est consacré expliquant son histoire, son parcours, son contenu. Il est aussi expliqué qu’un DVD-Rom avec le contenu des codex existe et est visible à la Bibliothèque de l’Institut de France ou au Cyber-Louvre du Musée du Louvre. Cependant, ce DVD-Rom date de 2003, tout comme probablement le site qui est très sobre et très primaire, et donc très peu contemporain. Il est donc regrettable qu’un travail de numérisation en ligne n’ait pas été proposé pour une actualisation de leur procédé.

Il existe un site fort utile pour compenser l’absence de numérisation des codex sur les sites institutionnels. Il s’agit du Léonard Digital, un mini-site italien d’archive digitale réalisée par la Bibliothèque Communale Léonard de Vinci. Il est également disponible en anglais, facilitant la navigation. Il faut se rendre sur « Browse » (Navigation ou « feuilletage ») pour accéder à la liste des documents numérisés. Nous y retrouvons, entre autre, tous les codex et manuscrits précédemment étudiés, en dehors du Codex Windsor. Nous pouvons donc même accéder à certains codex pourtant introuvables sur les sites officiels comme le Codex du Vol des oiseaux ou le Codex Leicester. Le mini-site propose une transcription en italien de chaque page des codex. Les outils sont juste un peu compliqués à comprendre, notamment dans le système de recherches où il est nécessaire de spécifier recto ou verso, mais ils semblent permettre de nombreuses interactions avec les pages : zoom, rotation, notes de bas de page… Ce site n’est pas très moderne mais révèle une quantité de travail monumentale et indispensable pour des recherches sur Léonard de Vinci et ses inventions.

Léonard de Vinci nous a donc laissé un héritage gigantesque à travers toutes ses notes et croquis dans ses codex. Ils ont traversé l’histoire, bien que près de la moitié ne nous soit pas parvenue. Dispatchés à travers le monde, dans différentes institutions, dans des collections publiques ou privées, nous pouvons aujourd’hui accéder à la plupart d’entre eux grâce au travail de numérisation des sites officiels de ces instituts ou encore celui d’archivage digital de plus petit institut externe, cherchant à permettre aux recherches de Léonard d’être toujours plus accessible pour tous. Ce fut vraiment très intéressant de nous pencher sur ces codex, de partir à la recherche de leur contenu et de découvrir autant de lectures autour de ça.

Le travail de numérisation de la Bibliothèque Ambrosienne.

La Bibliothèque ambrosienne de Milan est connue mondialement, sa réputation n’est plus à refaire. Elle fut fondée en 1609 par Federico Borromeo, cardinal de Milan, qui souhaitait un nouveau lieu de haute culture, artistique, scientifique et littéraire, dans une période fortement influencée par l’humanisme. Elle fut construite par les architectes Lelio Buzzi et Francesco Maria Richini. Au cours du temps se sont ajoutées une académie, une pinacothèque et une médiathèque. Sa particularité était surtout d’être publique. Son nom est tiré d’Ambroise, évêque inspirant le culte ambrosien, particulier à Milan, et patron de la ville.

La Bibliothèque recueille des textes exceptionnels dans de nombreuses langues : latine, grecque, orientales… Nous nous intéresserons en particulier à la Médiathèque puisque celle-ci détient le Codex Atlanticus, comme nous l’avons déjà vu dans notre article sur le documentaire « Dans la tête d’un génie ». Il s’agit de la collection la plus ample et stupéfiante d’écrits et de dessins de Léonard de Vinci. Ce « code » relate plus de quarante ans de la vie intellectuelle de Léonard, puisqu’il a été écrit entre 1478 et 1519. On trouve tout autant de notes et croquis sur l’astronomie, la mécanique, les mathématiques, la botanique, la géographie, l’anatomie ou encore la physique. On y trouve également des projets urbanistiques pour la ville de Milan, un plan d’immeuble à Florence ou encore des croquis d’automates.

Ce codex n’est en revanche pas accessible au public, de par son statut de trésor culturel. Il se trouve d’ailleurs dans la Salle du Trésor de la Bibliothèque Ambrosienne. Cependant, la Médiathèque travaille actuellement sur le projet de classer toutes les feuilles en douze volumes afin de pouvoir l’exposer au public. Le codex serait consultable de manière séquentielle et indexé de manière à pouvoir faire des recherches par mots, titres, numérotation de page ou texte libre. Ce qui nous intéresse particulièrement ici, c’est que le site de la Bibliothèque, une section est spécialisée sur ce codex. La Médiathèque a commencé un travail de numérisation de ces feuilles de codex, de manière à permettre une consultation numérique en ligne. La partie sur Léonard touche également une section de publications autour du codex mais nous n’y attarderons pas dans cet article.

Ce travail n’est pas terminé mais comporte déjà 440 feuilles sur 1119 au total. Cependant, cela reste pour l’instant un aperçu suffisant sur une récolte extrêmement importante de la culture scientifique et technique du monde occidental du XVe siècle.

Au niveau du site en soit, il n’est pas négligeable de remarquer son manque de fonctionnalité. De plus, il est en italien, ce qui est acceptable dans la mesure où il s’agit d’une bibliothèque milanaise, mais il ne propose aucune autre langue. Bien que la langue anglaise soit indiquée, cette fonctionnalité ne semble pas marcher puisqu’aucun changement ne s’opère.

Reliure du Codex Atlanticus de De Vinci, 1478-1519 © Bibliothèque Ambrosienne, Milan.
Reliure  du Codex Atlanticus de De Vinci, 1478-1519 © Bibliothèque Ambrosienne, Milan.

Pour accéder à notre section sur le Codex Atlanticus, ce n’est pas forcément instinctif, cela demande une certaine recherche. Sur la page d’accueil, cette dernière accumule un grand nombre de textes et liens hypertextes dans la même police, la même couleur et surtout une taille plutôt réduite. Peu de d’éléments se distinguent des autres pour comprendre les différentes catégories du site. La section sur Léonard (« Leonardo ») est trouvable sur le menu le long de la bannière, dans une liste de liens non alignés. Nous arrivons ensuite sur la page du Codex, plus claire, plus simple mais qui manque encore peut-être une fois de titres démarqués. Ensuite, il suffit de cliquer sur le lien hypertexte «Per visualizzare il Codice Atlantico » pour accéder aux numérisations. Le lien est ici visible car mis en couleur et ponctué de symboles de lecture, bien que ces derniers ne soient pas très modernes non plus.

Nous retrouvons alors face à un choix de quatre liens, correspondant aux numérotations des feuilles du codex. Nous pouvons remarquer que cela va jusqu’à 1117. En effet, bien que seulement 440 feuilles soit numérisées et répertoriées ici, il ne s’agit pas d’une numérisation par ordre. Ainsi, on trouvera facilement des pages manquantes si on cherche à visualiser le codex dans l’ordre.

Si on se rend sur l’une des quatre pages proposées, on se retrouve de suite sur une feuille de codex. On a alors le numéro de la page, l’indication s’il s’agit du recto ou du verso, une miniature de la feuille (où on nous propose un zoom qui ne fonctionne pas, ce qui est très dommage), le titre, les dimensions et la description de son contenu. Pour aller à la feuille suivante, il faut soit choisir un nombre en dessous (qui ne correspond pas au numéro de la feuille) ou cliquer sur la flèche suivante. Il y a donc deux choses gênantes alors. Tout d’abord, ce numéro de page qui ne correspond à la numérotation des feuilles, empêchant une navigation facile. De plus, pour compenser cela, il n’y a pas de recherches possibles, par mot, titre ou autre.

Pour conclure, nous avons donc une source incontournable lorsque l’on s’intéresse aux travaux et inventions de Léonard de Vinci, le Codex Atlanticus restant une source inévitable pour accéder à la représentation directe du génie Cependant, le site reste un peu décevant pour une telle institution. En effet, le site manque de modernité et surtout de pratique, notamment dans la navigation. On ne peut circuler aisément dans les feuilles du codex et on regrette que ces miniatures ne s’agrandissent pas. Cependant, il faut espérer qu’une fois le travail de numérisation terminé, ces problèmes seront réglés.

Dans la tête d’un génie (Documentaire)

Tiré de la chaine ARTE, diffusé le 7 mars 2013.

Pendant 1h28, ce documentaire nous montre une supposée façon de penser de Léonard de Vinci, à travers interventions de grands historiens de l’art mais surtout à partir du Codex Atlanticus et de ses dessins, gardé à la Bibliothèque ambrosienne de Milan. Un comédien se prend pour le génie pour essayer de retranscrire et exprimer les pensées de ce dernier.

Le documentaire s’intéresse dans une première partie au rapport qu’a De Vinci avec la nature, notamment ses études et observations qu’il va utiliser pour perfectionner sa peinture, comme le sfumato, avec les jeux de couleurs sur les montagnes grâce aux rayons du soleil, mais aussi le mouvement de l’eau qu’il allie à celui des cheveux. Cependant, outre la peinture, il s’y intéresse également scientifiquement, dans le domaine de la biologie et de géologie, étudiant les origines de la nature par exemple.

On y apprend également qu’il n’avait pas reçu une éducation humaniste et qu’il ne souhaitait pas partager ses inventions avec le reste de la communauté scientifique ou artistique, pensant qu’un jour, elles feraient sa fortune et sa gloire. La deuxième partie traite d’ailleurs de ses machines, la partie nous intéressant donc le plus. Est mentionnée notamment l’inspiration des machines de Brunesllechi pour les premiers travaux de Léonard en architecture et son avancée remarquable pour l’époque, puisqu’il faudra attendre deux siècles à la révolution industrielles pour que les idées de De Vinci soient exploitées : chariot autopropulsé (première automobile), métier à tisser automatique, navette volante, brevetés par John Kay au XVIIIe entre autres. Dans ses dessins, il y présente les machines démembrées et en vue en perspective, en transparence, en coupe pour comprendre son montage.

Une troisième partie est réservée pour sa fascination pour l’air, le ciel et le vol, mêlant nature et ingénierie.
La cinquième partie nous intéresse de nouveau lorsqu’il quitte Florence pour Milan et se penche sur l’invention d’armes, et envoie une lettre au duc de Milan pour intégrer sa cour et vendre ses qualités de génie militaire. Cela concernerait des centaines de dessins dans son codex.
Après une partie sur la sculpture équestre pour Sforza, le documentaire se termine sur Léonard et les proportions et le lien très fort qu’il fait entre mathématiques, biologie et anatomie, et ses nombreuses études de dissection.

Nous avons donc affaire à un documentaire très riche, étudiant tous les aspects du génie du personnage. Bien que tous les sujets ne touchent pas ce que nous recherchons dans notre étude, il est important de voir que chez cet homme, toutes ses recherches et ses travaux y auront un rapport de près ou de loin.